Paul et Bonaparte : étude historique d'après des documents inédits

PAUL ET BONAPARTE. 653

ce qui est des secours accordés à nos alliés en vertu de traités défensifs, on n’a pas le droit — d’après les règles établies en politique ab antiquo — de considérer la puissance auxiliaire comme belligérante tant que cette puissance ne renforce pas ces mesures au point de faire cause commune avec ses alliés; néanmoins il a existé entre nous une espèce de rupture occasionnée par la cessation de tous rapports et par d’autres événements amenés par les circonstances. À l'effet de mettre fin à cet état d’hostilité et de rétablir la tranquillité et la bonne entente, nous ne tenons pas pour superflu, mais, au contraire, pour on ne peut plus utile de conclure avec le gouvernement français un acte ou une convention de paix. » L'empereur ne se prononçait pas clairement sur la question de la médiation. D'un côté il ne voulait pas désobliger ses alliés en leur refusant ses bons offices, de l’autre il prévoyait les ennuis et les embarras qui en résulteraient pour lui-même : il ne s'y déciderait donc qu’à la demande expresse du Directoire. En attendant, le comte Panine était autorisé à entamer avec Caillard une négociation en trègle.

Mais ici commençaient à se faire sentir les restrictions inspirées à Paul par le parti hostile à la paix. Le plénipotentiaire russe devait s'opposer à la remise en vigueur du traité de commerce conclu peu d’annéesavantla Révolution, la Russie voulant se réserver la faculté de limiter l'importation des articles de luxe. On envisageait avec méfiance la reprise après la paix des relations politiques, parce qu'on craignait toujours la contagion des idées révolutionnaires. « Ces relations, disait l'instruction, sont considérées plutôt embarrassantes qu'utiles, vu les idées enracinées dans ce peuple et qui n'inspirent que de l’aversion à tout homme bien pensant. » On désirait les réduire au strict nécessaire en se bornant à la nomination de consuls et agents consulaires et enremettant l'installation de missions diplomatiques à une époque où le gouvernement français offrirait plus de garanties d'ordre et destabilité. Toutefois Panine ne devait pas faire deces réserves une condition sine qua non, mais il lui était enjoint de se montrer intraitable sur la question des émigrés. « Écartez, lui disait-on, d’une manière raisonnable mais ferme toute tentative des Français au préjudice de ceux de leurs compatriotes qui sont devenus Les victimes de leur fidélité à leur souverain légitime. Objectez qu'en stipulant par un article du traité obligation pour les deux parties de ne point se nuire ni en secret ni ostensiblement, nous