Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3
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mes, mais ils différaient beaucoup dans leurs vœux. Ce tumulte plaisait aux jeunes gens, qui se plaignaïient d’avoir vu leurs services méconnus par la convention. Les succès s'obtenaient facilement dans ces assemblées agitées; les orateurs se multipliaient à tel point, qu'on eût été heureux de trouver un même nombre de combattans déterminés. Les sections s'énivraient de félicitations mutuelles sur la vigueur de leurs actes, sur l’éloquence de leurs arrêtés. Toutes celles de Paris, à l'exception d’une ou deux, avaient rejeté les décrets.
On n’écoutait plus rien. Toutes les sections étaient sous es armes. On croyait avoir une armée. L’indignation s’accrut quand on vit la convention déclarer que les décrets des 5'et 13 fructidor étaient acceptés par la majorité des assemblées primaires. On voulut vaincre pour la démentir.
Le moment où les chefs des sections délibérèrent de repousser ou d'employer la force dut les livrer à d’amères réflexions sur les dangers de leur entreprise. Quarante-six assemblées délibérantes étaient bien loin d'offrir un centre d'action , et ne pouvaient manquer de contrarier celui même qu'on parviendrait à établir. Plusieurs hommes d'un mérite réel et d'une raison calme, entraînés dans ce mouvement sans l’approuver tout-à-fait, étaient habiles à montrer des dangers, froids et embarrassés à indiquer des ressources. Leurs sollicitudes inactives faisaient un contraste avec la bouillante impatience des jeunes gens. La section Lepelletier, autrefois redoutée des jacobins, sous le nom des Filles de Saint- Thomas, s'empara de la direction.du mouvement. Elle imagina de proposer aux sections. un acte de garantie; elle l'étendit aux villes voisines qui protestaient avec le plus de vigueur contre le règne de la convention. Trois de cellesci, Dreux, Nogancour et Verneuil, s'étaient portées à quelques excès dans leurs assemblées primaires. La convention avait employé la force pour les dissoudre, et le sang avait coulé. Vaineues, humiliées, elles envoyèrent à Paris des commissaires, qui réclamèrent en leur faveur lacte de
garantie, Les sections s’enflammèrent ; leurs chefs tinrent conseil; la mesure de sûreté dont ils convinrent pouvait être regardée romme une agression. Il fut résolu que le corps électoral s’assemblerait au Théâtre- Français, et que les sections lui fourniraient une force suffisante pour le défendre. Gn se souvenait de ce qu'avait pu l’assémblée des électeurs de 1989. Rien n’est plus séduisant, et rien west plus trompeur que limitation d’un moyen qui a réussi dans des circonstances différentes. s