Séance de rentrée des cours de la Faculté de théologie protestante de Paris, le samedi 7 novembre 1903

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culier. Je n'ai que l'embarras du choix entre des pages de sa Révolution religieuse au x1x° siècle (1), de son étude sur Marniæ de Sainte-Aldegonde (2), de son cours sur le Christianisme et la Révolution française (3) et enfin de ses deux volumes sur la Révolution (4). Je préfère vous en citer une, moins connue, mais qui mérite d'être tirée de l'oubli : « Quelques personnes d’un esprit très affranchi, dit-il, croient qu'il est à regretter, pour l'unité sociale, qu’il n’en ait pas été de même en France (c'està-dire que le protestantisme n'y ait pas été extirpé comme en Espagne et en Italie); elles croient qu’une seule religion eût donné à ce pays plus de consistance. Je me persuade, au contraire, que ce fut une faveur du Ciel, pour nous, d'avoir échappé à l'esprit d'exclusion, qui se partagea le xvr siècle. Ce n'est pas sans la volonté d’en haut que nos frères, les protestants de France, ont échappé à tant de pièges, de meurtres, d'exils, de carnages. L'épée n'a rien pu contre eux, parce qu'ils étaient nécessaires à l'œuvre et à l'avenir de tous (5)! »

N’y a-t-il pas dans ces paroles une condamnation de cette chimère de l’unité morale de la nation, dont la poursuite a engendré tant d'intolérance en France, depuis 1685?

Après ces dernières citations, j'espère, Mesdames, Messieurs, avoir gagné devant vous la cause d'Edgar Quinet et vous avoir prouvé qu'il a plus d’un titre à notre admiration et à notre reconnaissance. En somme, il a été, avec B. Constant, Guignaut, Alfred Maury, l’un des initiateurs du public français à la science comparée des religions et a mis en relief l'importance de cette étude pour l'explication des institutions politiques. Avec son grand ami Michelet, il a montré que la question religieuse a été un facteur de premier ordre dans les révolutions politiques, et salué dans les Réformateurs des émancipateurs de l'esprit humain et des fondateurs des libertés modernes. Il a été enfin le précurseur de Renan dans l'étude du peuple d'Israël et des origines du christianisme. Il serait puéril, comme on l'a fait récemment, d'établir un clas-

(1) Le Livre de l'Exilé, p. 533-534. (2) Marnix, p. 48 et 109.

G) Leçons X et XI.

(4) La Révolution, I. p. 135, 145-147. (5) Ultramontanisme, p. 241.