Souvenirs de Russie 1783-1798 : extraits de journal de Mme Leinhardt

SOUVENIRS DE RUSSIE 27

mes troupes. » Si l’anecdote est vraie, cette conduite et ce style laconique n'auront pas manqué d’avoir l'approbation de celle à qui la lettre était destinée. »

Le 22 : « On publie ces jours le manifeste, qui surprend par la hardiesse avec laquelle la Porte nous a cherché noise. Ses nombreuses propositions élaient inacceptables, aussi nont-elles été faites que pour la forme, car on n’a accordé que quinze jours pour avoir la réponse, tandis qu'il en fallait: le double, et, sur la déclaration du ministre, qu'il ne pouvait se relâcher en rien des articles du dernier traité de paix, on a commencé par l'enfermer aux Sept-Tours, ensuite de quoi ces mécréans se sont livrés à leurs déportements ordinaires, ont regardé la guerre comme déclarée, sont tombés sur un détachement de troupes russes qui ne s'attendait à rien de leur part et ont remporté ainsi par fraude le seul avantage que, vraisemblablement, ils remporteront de toute cette guerre. Ils ont aussi tiré sur deux galères russes, l'une*de 36, l’autre, très petite, seulement de 6, qui s'en allaient paisiblement au port de Sébastopol pour escorter La gloire de Catherine, superbe vaisseau de ligne nouvellement construit. L'officier qui commandait ces bâtiments s’est comporté avec autant de valeur que de prudence et a soutenu pendant plusieurs heures le feu de la flotte ennemie. Il a tiré luimême un grand nombre de coups et a fini par échapper heureusement, mais le beau vaisseau de ligne est resté, pour le moment, en leur pouvoir.

« C’est Le troisième vaisseau de ce beau nom que les Russes ont perdu, ce qui paraît très extraordinaire. Nous avons deux armées : le prince Potemkin commande l'une, et l'autre, qui est sous les ordres du maréchal Roumianzoff, sera l’armée d'observation. Du reste, on n’est point iei en peine de cette guerre. Le seul désagrément qu'elle pourra causer sera d'augmenter le prix des denrées, quoiqu'on se propose bien de nourrir les troupes aux dépens des ennemis. »

Le 25 : « On ne saurait imaginer quelle ardeur guerrière s’est emparée de toute notre Jeunesse. Tous aspirent à partir pour l’armée ; les mères veulent envoyer leurs fils, les jeunes femmes leurs maris ; plusieurs de ces dames veulent quitter la capitale pour les suivre jusqu'à Kielf, Krementschouk. Numeroff et aufres villes voisines des places où les armées seront canlonnées où campées, pour être plus à portée et avoir de leurs nouvelles, »