Les derniers jours d'André Chénier
LES DERNIERS JOURS D'ANDRÉ CHÉNIER 295
tale et descendit à l'hôtel de l'Europe, rue du Mail, nous a laissé la curieuse confidence de ses premières impressions... € Nous entrâmes dans Paris, nous dit-il, je , trouvais à tous les visages un air goguenard... À cette époque, tout était dérangé dans les esprits et dans les mœurs. Les magistrats rougissaient de porter la robe, et tournaient en moquerie la gravité de leurs pÊres.e Les présidentes, cessant d’être de vénérables mères de famille, sortaient de leurs sombres hôtels pour devenir femmes à brillantes aventures. » Ce jeune Breton s'appelait le chevalier de Chateaubriand. C’est lui qui l’un des premiers a révélé au monde la gloire d'André Chénier. Le futur auteur des Martyrs eut le regret de ne pouvoir s’habituer à l'atmosphère capiteuse de la cour et de la ville, en ces années délicieuses et inquiétantes où M. de Talleyrand goûtait la « douceur de vivre », et où les grands seigneurs travaillaient de leurs propres mains, avec une singulière allégresse, à la ruine de l’ancien régime et à l'avènement de la Révolution.
M. Pasquier, qui fut depuis préfet de police sous l’'Empire et chancelier de France sous le roi Louis-Philippe, et qui était alors un des plus jeunes conseillers du Parlement de Paris, nous conte aïnsi ses débuts judiciaires | et mondains : « Quand je suis entré dans le monde, j'ai été présenté parallèlement chez les femmes légitimes et chez les femmes illégitimes de mes parents, des amis de ma famille, passant la soirée du lundi chez l'une et celle du mardi chez l’autre, et j'avais dix-huit ans et j'étais d’une famille magistrale! »
Aimée de Coigny, dans ses Mémoires, cite un autre grand premier rôle de cette tragi-comédie, l'avocat général Hérault de Séchelles, celui qui, après avoir brillé dans les derniers salons de l’ancien régime, devait finir sur l'échafaud avec Danton.
Apparenté à la plus haute noblesse, issu d’une