Paul et Bonaparte : étude historique d'après des documents inédits

PAUL ET BONAPARTE. 645

tiens s'obstinaient par vanité à maïntenir vis-à-vis de la cour de Russie leurs prétentions à la préséance qui leur avait été concédée par le congrès de Westphalie, mais que la Russie se refusait à reconnaître, objectant avec raison qu'elle ne saurait se soumettre aux décisions d’une assemblée dont elle n'avait pas fait partie. Sous l'Empire, le mariage de Napoléon avec une archiduchesse la fait dévier de la ligne de conduite politique qu'il s'était tracée à Tilsit trois années auparavant. Ce sont surtout les affections de famille qui ont motivé les préférences de LouisPhilippe au profit de l'alliance anglaise. Enfin, n'est-ce pas pour

rester fidèle à la tradition bonapartiste que Napoléon III se crut obligé d'intervenir dans les affaires de Pologne, ce qui ne pouvait manquer de lui aliéner l'amitié de la Russie.

En Russie rien de semblable, une parfaite harmonie n'ayant jamais cessé de régner entre les vues du souverain et les aspirations du peuple. Le sentiment national trouvait habituellement dans les monarques russes des interprètes convaincus, les intérèts nationaux d’ardents défenseurs. C’est à ce double point de vue que Pierre le Grand, Catherine IE, Paul se sont toujours montrés animés à l’égard de la France de dispositions très bienveillantes. Inutile de rappeler ce que les Français doivent à la mémoire des deux Alexandres dont l’action personnelle s'est invariablement exercée en leur faveur. L'empereur Nicolas luimème, si inflexible sur Les principes, refusant à Louis-Philippe et à Napoléon IT le titre de frère, se plaisait à affirmer hautement ses sympathies pour la France et les Français. Il y à plus. On peut dire que chacun de ces souverains caressa à un certain moment de son règne la pensée de l'alliance francaise. J'ai relaté Les projets de Pierre; Catherine voulait les reprendre à la veille de la Révolution; Paulse tenait tout prêt à se jeter dans les bras que Jui tendait Bonaparte; Alexandre L°* était sincère à Tilsit et légua à son successeur une véritable « entente cordiale » avec la Restauration ; Nicolas fut le meilleur ami de Charles X et Alexandre IT fit après Sébastopol l'essai loyal d'un accord avec Napoléon IE. Rèveries éphémères, soit! mais qui n'en restent pas moins des symptômes fort significatifs de la bonne volonté dont les autocrates qui se sont succédé sur le trône de Russie ont de tout temps été remplis envers la France.

Tout autres étaient les dispositions de la diplomatie russe dont l’attitude constante vis-à-vis de ce pays peut être résumée