Paul et Bonaparte : étude historique d'après des documents inédits

660 LA NOUVELLE REVUE.

tuels offre à l'intrigue un champ vaste, des occasions fréquentes et des résultats possibles. Mais dans les déserts de la Russie le genre de trouble qu’on affecte de craindre manque d'éléments. Il faudrait une armée de propagandistes pour insurger un village et je pense qu'on ne nous suppose point assez ineptes pour prendre jamais la défense de quelque fou qui provoquerait par des actions vraiment répréhensibles la juste animadversion des lois de l'empire russe. Mais, je vous Le répète, le Directoire nesouffrira point que cette supposition trouve place dans le traité et qu’on y insère une clause qui paraîtrait dictée à un ennemi vaincu... »

Passant de la défensive à l'offensive, le ministre poursuivait : « Croit-on que nous n’eussions pas aussi quelques réclamations à faire. Si nous nous sommes tus sur le serment infâme qui avait été exigé en Russie et en Pologne des Français que leurs affaires y retenaient et dont plusieurs ont sacrifié leur fortune pour s'y soustraire, c’est parce que nous n'avons pas douté que le premier effet de ce traité fut la révocation spontanée d’une formalité qui est pour la République française une injure dont nous aurions dû peut-être exiger la réparation solennelle (4). »

A l'instruction était joint un projet de traité en huit articles également approuvé par le Directoire. I était prescrit à Caïllard de ne point s'en écarter pour le fond et d'en conserver la forme et la rédaction autant qu'il serait possible. Je reproduis en entier ce document important, inconnu jusqu'ici, n'ayant, que je sache, jamais été publié.

Projet de traité.

La République française et Sa Majesté l'Empereur de toutes les Russies désirant de rétablir la paix et la bonne harmonie qui avaient subsisté entre Les deux États avant la guerre actuelle, ont nommé à cet eflet, savoir : le Directoire exécutif au nom de la République française... et Sa Majesté l'Empereur de toutes les Russies… lesquels après avoir échangé leurs pleins pouvoirs respectifs ont arrêté les articles suivants :

ARTICLE PREMIER. — Ïl ÿ aura paix, amitié et bonne intelligence entre la République française et Sa Majesté l'Empereur de toutes les Russies.

Arr. 2. — En conséquence toutes hostilités cesseront entre Les deux puissances à dater du jour de l'échange des ratifications, et

(1) Talleyrand à Caillard, le 3 vendémiaire an VI (24 septembre 1797). Inédit.